Chapitre 1
I
Avoir un enfant handicapé est à la fois la meilleure chose et la pire qui me soit arrivée.
Le handicap vous force à l’humilité , le don de soi , l’oubli même, plus rien n’est jamais pareil face à l’annonce du handicap. Tout ce en quoi vous croyez , vous aspiriez , tout ce que l’on vous avait enseigné ou transmis , ce que nos sociétés riches vous véhiculent depuis votre plus tendre enfance , tout ceci n’existe plus , n’a plus lieu d’être , vous semble ridicule , obsolète , un brin énervant , et plus tard révoltant , abjecte , insupportable !
Personne ne rêve d’avoir un enfant différent, on veut tous l’enfant parfait, réussi, plein d’avenir, une promesse pour le futur, une réalisation de ses désirs inassouvis et cet enfant je l’ai eu avec ma fille Emma, mon trésor et j’espère encore avec cet enfant qui grandit en moi en ce moment…
Face au handicap il faut accepter de se battre et d’être courageuse ou bien vous mourrez de douleur ; malheureusement ce n’est pas si simple et c’est bien souvent que j’ai eu envie de tout laisser tomber, de mourir avec mon fils car la société n’a pas de place pour lui.
On fait semblant de s’occuper du handicap, on offre de pauvres solutions pour se donner bonne conscience mais il n’existe pas de véritable volonté d’aider les enfants handicapés. Le handicap coûte cher, dérange, use, dégoûte, bref ce n’est pas un bon placement, cela ne rapporte rien aussi ce n’est pas une priorité comme bien d’autres domaines similaires : le chômage, la pauvreté, la psychiatrie…Je ne vais pas faire une critique de l’ensemble de la société française actuelle mais je me sens comme beaucoup de personnes en décalage. Il semble que certains s’évertuent à faire fonctionner le monde avec pour seul but l’argent, le profit alors que des millions d’autres voudraient simplement être respecter, heureux , vivants.
Parfois je me dis que la société devrait simplement euthanasier les enfants handicapés à la naissance au lieu de faire croire aux parents et à tous qu’elle va faire quelque chose , au moins ce serait clair. Mais non ,elle préfère faire croire, sauver les apparences en proposant des solutions inadaptées, et même parfois inhumaines.
Pourtant, grâce à mon fils, je suis certainement quelqu’un de moins bête ,de moins égoïste , de moins intolérant…Et si mon fils a réussi à faire cela avec moi il doit pouvoir le faire avec d’autres …
Je ne suis pas parfaite mais je reste toujours humble ; forcément on peut moins se la jouer quand on a un enfant qui ne parle pas à 5 ans , qui porte encore des couches , qui bave sur ses camarades , qui répond oui quand on lui demande « comment tu t’appelles ? », qui se roule par terre comme un autiste , qui casse tous les objets lorsqu’on va chez des amis , qui tombe sur les plus petits , qui marche sur les autres sans dire pardon , qui prend les biens des autres sans permission etc…
